dimanche 12 février 2012

Tous mes secrets



En librairie le 14 février.

mardi 18 octobre 2011

J'ai des sentiments


C’est l’automne et je sais pas si c’est parce que je travaille avec presque juste des filles, je sais pas si c’est la pièce qui nous retourne le coeur comme une chaussette, qui nous laisse comme dénudées, tous nos chagrins offerts à la galerie, le paquet d’allumettes dans la main et plus de voix pour finir la dernière réplique, je sais pas si c’est cette histoire de soeurs, amour fou qui se cabre, je sais pas si on a besoin de dormir, de hurler ou de faire silence, mais on dirait qu’il n’y a pas assez de place dans mon corps en ce moment pour tout ce qui s’y bouscule.  
J’ai envie de lire, lire, lire jusqu’à me perdre, m’oublier, ne plus me connaître.  J’ai envie de chanter et j’ai encore plus envie d’écrire des chansons, déchirantes, ruineuses, éperdues, palpitantes.  J’ai envie de sacrer mon camp et pis non, j’ai pas envie, j’ai envie de brasser de l’air, j’ai envie d’envoyer des tonnes de choses par la poste, j’ai envie de n’avoir pas de sens  -  j’ai envie d’être dans un roman de Ducharme, j’ai envie de nuits blanches et de voir le soleil se lever sur la ville, je me contiens pas, j’aime ça pis j’aime pas ça, je comprends rien.  J’ai le goût de faire des choses sublimes.  J’ai le goût de lancer des affaires.  J’ai le goût de manifester.  J’ai le goût d’avoir sept robes et de changer tous les jours.  J’ai le goût d’appeler du monde que je connais pas.
  
À la place de toute ça, parce que mon horaire est comme qui dirait complet, je me couche à onze heures max, je lis juste dix pages puis je tombe de sommeil, et le jour, le jour je cours d’une place à l’autre comme un petit soldat qui comprend pas c’est quoi le conflit.
  
C’est quoi l’affaire?

C’est-tu juste parce que je manque de lumière?

dimanche 28 août 2011

ton corps est une forêt

ton coeur c'est le chalet

les cercles de lumière sous les lampes
des ailes qui filent
petits bruits d'herbe d'aiguilles d'eau
insectes fous
pattes de souris
thé au jasmin
temps
rivière
galaxie

et le grand calme gris acier
paix sombre
mémoire étale
comme une sorte d'amnistie

le lac
réponse sybilline
à la vaste question qu'est ta vie

et un huard
et ton père qui sourit



samedi 20 août 2011

Quelques (minuscules) bleus

parfois je me demande
où est le sens

vers quoi

les fils se tendent

poèmes illisibles
routes espoirs
impraticables

je suis debout ici depuis si longtemps

et
tu l'as dit

tu ne m'avais jamais vue avant

samedi 9 juillet 2011

Vacance

Églantine sel algue sèche
l'odeur de ton île

le ciel comme une robe trop grande
le fleuve comme un amant qui bouge un peu en dormant
la lumière sur ta vie

écoute

tu ne sais jamais quand le chemin commence
ni où il finit

tu ne sais rien
ni l'heure ni ta chance

juillet et le silence

le vent dans les histoires
qui s'agitent doucement au fond de ta tête
vastes oiseaux qui s'ébrouent

les trésors que tu glanes
dans le sable mouillé de matin et d'espoir
brillent au soleil
comme tu me manques
même ici
baignée de mille grâces éblouissantes
parfumées
vivaces
sauvages


quelqu'un manque





vendredi 3 juin 2011

Jaune beurre gris débris

Cette lumière-là
jaune
tenace
dense
sous les nuages gris foncés
cette lumière-là
c'est comme avoir des nouvelles de toi
sans l'avoir cherché
c'est tout à coup le savoir
où tu seras tout l'été
le savoir et ne plus l'oublier

cette lumière-là
me prend le coeur
le tord
et le laisse là

et quand ça arrive le même soir
lumière d'automne en juin
et ton nom
ton nom
ton nom
je te raconte pas



jeudi 23 décembre 2010

Moi c’est la neige

Il y a des gens qui ne peuvent pas supporter juillet. Les nuits douces, l’air dehors, à la même température que celle du corps, la sueur salée, les concerts en plein-air. Les plaines, la lune, les vacances. Les pique-niques. Être nu pieds, être en robe, danser et puis manger tard, avec les doigts, des légumes cuits au barbecue, rien qui est prêt au bon moment. Le rosé. Le soleil. La mer, la route. Le melon d’eau. Cracher les pépins. Avoir du jus sur le menton. Être beau et collant, et bronzé, et heureux.


Il y en a qui ne peuvent pas venir voir l’automne. Les foulards et la laine, et la rentrée, l’odeur du papier neuf, livres, cahiers, crayons de bois. Les cours de natation. Reprendre. Comprendre. Apprendre une langue. Les petits bonnets, les gants, les joues roses et la buée qui sort de la bouche comme un signal, le froid piquant, le chaud moelleux, le marché et les pommes cuites, prendre des marches, faire des feux, guetter les étoiles dans le ciel étonnament clair de septembre, voir les jours raccourcir. Manger des huîtres. S’envelopper. Porter des jupes longues et des chemises. Avoir une nouvelle coupe de cheveux. Être brillant et lire des poèmes à haute voix, le soir, avant de dormir. Boire du thé. Essayer d’écrire.


Et puis pour presque tout le monde, il y a le printemps, bien sûr. Arbres et bourgeons et fleurs et pollens, bien sûr, et les abeilles, et les oiseaux. Piailler. Chanter dans la rue. Sortir dehors en souliers pour la première fois. Retrouver ses lunettes fumées. Avoir envie de déshabiller tout le monde. Poser les lèvres sur les cous soudain découverts, sur la peau retrouvée, jambes nues, épaules nues, têtes nues. Fièvre. Sève. Changer l’heure. Fondre et regarder fondre. Et les rivières en crue. Asperges, têtes de violons. Être neuf. Être en voyage. Appeler, attendre, et espérer, violemment, espérer.


Moi c’est la neige.


Quand il y a cette neige-là qui tombe, simple, nue, vraie - quand il y a cette neige lente, et sincère, et pure, qui tombe dans la nuit, c’est comme si tout ce qu’il y a d’intact en moi se levait debout. Moi c’est à ce moment-là que pour quelques secondes, parfois - je n’en peux plus d’être toute seule.

Le reste du temps ça va.


Le monde, au début, a peut-être juste été neigé. Beaucoup de paix. Beaucoup de blanc. Et les choses qui dormaient en-dessous.


Parfois je pense qu’il n’y a pas eu de big bang. Il y a juste eu une première neige.